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URBAINES

Ondes moyennes n°693 -

Réforme de l'organisation territoriale : renforcement du couple région - intercommunalité


Alors que le deuxième volet du projet de loi de décentralisation a été remis au Conseil d’Etat fin avril, le Premier ministre affirme dans son discours devant les députés ce mardi 29 avril vouloir aller plus vite pour réformer l’organisation territoriale.
Ondes moyennes revient sur le texte qui devrait être présenté en conseil des ministres le 14 mai.
Des Régions puissantes au niveau local... et national
Le projet de loi « clarifiant l’organisation territoriale de la République » confirme le renforcement des compétences des régions, en particulier en matière de développement économique, de transport, de prévention et de gestion des déchets, d’aménagement et de développement durable.
La planification devient le mode d’organisation privilégié des compétences décentralisées au niveau régional. Pour chacune de ces compétences en effet, la région devra élaborer des schémas dont la loi devrait préciser de manière très fine le contenu (état des lieux, prospective, objectifs à atteindre, planification à moyen et long terme, indicateurs de suivi...). Les conférences territoriales de l’action publique (CTAP), créées par la loi « Lebranchu » promulguée en janvier dernier, seront consultées « pour avis » et les collectivités « infra-régionales » pourront continuer de réaliser des actions, sous réserve de la signature d’une convention qui le prévoit, et dans la mesure où cette action est compatible avec le schéma. L’ensemble des documents stratégiques établis par ailleurs à d’autres niveaux (schéma de cohérence territoriale, plan local d’urbanisme) devront eux aussi lui être compatibles.
Les modes de concertation font émerger un renforcement du dialogue « régions/intercommunalités », puisque c’est l’échelon intercommunal (et non communal) qui est privilégié dans la concertation avec les régions. Ainsi, seules les EPCI sont associés à l’élaboration du « schéma régional d’aménagement et de développement durable du territoire ».
En matière d’aide aux entreprises (création, extension, aides aux entreprises en difficulté), la région devient seule compétente.
Plus innovant, les régions pourraient voir leur pouvoir réglementaire renforcé, et même bénéficier d’une forme d’initiative législative locale, puisque « par délibérations concordantes, deux conseils régionaux au moins peuvent présenter des propositions tendant à modifier ou adapter des dispositions législatives et règlementaires en vigueur ou en cours d’élaboration concernant les compétences, l’organisation ou le fonctionnement de l’ensemble des régions ». En outre, le projet de loi confirme que les régions disposeront d’un pouvoir règlementaire pour l’exercice de chacune de leurs compétences.
Des périmètres intercommunaux élargis
Le projet de loi propose, dans son article 12 et suivants,  et d’ici au 31 décembre 2015, l’élargissement des communautés de communes de 5 000 à 10 000  habitants ; soit une réduction importante des communautés les plus rurales qui regrouperont de plus en plus de communes sur des périmètres de plus en plus grands.
Il  prévoit, d’ici au 31 décembre 2016, la dissolution des syndicats de communes et de syndicats mixtes, dans les domaines de l’eau potable, de l’assainissement, des déchets, du gaz, de l’électricité et des transports. Ces compétences pourront être transférées aux intercommunalités. Sur proposition du représentant de l’Etat dans le département, les conseils municipaux ou les organes délibérants disposeront d’un délai de trois mois à compter de la notification de l’Etat pour se prononcer sur la dissolution envisagée.
Des compétences intercommunales étendues
Le projet de loi élargit les compétences obligatoires et les compétences optionnelles des groupements et la notion d’intérêt communautaire.

 

Sont ainsi ajoutées au moins deux des compétences suivantes : tourisme (voir article ci-dessous), développement économique d’intérêt communautaire dans le respect du schéma régional de développement économique, d’innovation et d’internationalisation, aménagement, entretien et gestion des aires d’accueil des gens du voyage, création et gestion des maisons de service au public.
Les communautés de communes et d’agglomération ont selon le texte jusqu’au 30 juin 2016 pour se mettre en conformité au niveau de l’évolution des compétences.
Paradoxalement, le texte permet de partager les trois compétences que sont la culture, le tourisme et le sport (article 24) entre collectivités locales. Ces dispositions devront être précisées si l’on tient compte de ce que propose le projet de loi, en particulier sur le tourisme.
Des compétences départementales redéfinies
Le projet prévoit la suppression de la clause de compétence générale des départements (article 20). Il prévoit également le transfert de compétences du département à la métropole, qui seront transférées de plein droit au 1er janvier 2017, à défaut de convention entre les deux collectivités.
Il précise que le département peut contribuer au financement des opérations dont la maîtrise d’ouvrage est assurée par les communes et les groupements. Il peut apporter son soutien à l’exercice des compétences, et contribuer aux opérations d’investissement en faveur des entreprises de services marchands en milieu rural.
Le projet affirme le rôle du département dans le pilotage des services à la population, qui sera chargé d’élaborer avec l’Etat, un schéma d’amélioration de l’accessibilité des services au public.
Pour des collectivités responsables...
En cas de méconnaissance d’une disposition du droit de l’Union européenne par les collectivités territoriales dans l’exercice de leur compétence, la responsabilité des collectivités pourra être recherchée à l’occasion d’un recours en manquement adressé par la Commission européenne à la France. L’article 29 dispose en effet que l’Etat pourra se retourner contre la collectivité pour assurer sa défense et les astreintes et amendes adjointes à l’arrêt de la Cour de Justice de l’Union européenne devront être payées dans la totalité ou pour partie par les collectivités, à hauteur de leur responsabilité respective. A noter qu’il s’agit de sommes s’élevant en général à plusieurs millions d’euros.
Plus de transparence et un encadrement des dépenses des collectivités...
Sous couvert de transparence, les dispositions du titre IV permettront en réalité à l’Etat de mieux contrôler les dépenses des collectivités. Ces dispositions ont le mérite d’encourager  les collectivités à optimiser la gestion de leurs ressources. Elles sont toutefois synonymes de contraintes supplémentaires auxquelles les villes devront à nouveau faire face. Ainsi, le contrôle local exercé par la Cour des Comptes et des Cours régionales des Comptes est renforcé : les exécutifs locaux devront établir un rapport exposant la manière dont ils ont tenu compte des observations formulées par la Cour régionale des Comptes, tandis que le rapport de la Cour des Comptes sur la situation financière des collectivités, réalisé pour la première fois sous cette forme en 2013, est institutionnalisé, et devient annuel. Tous les exécutifs locaux (villes de plus de 3 500 habitants, départementaux, régionaux) doivent établir, dans un délai de deux mois précédant l’examen du budget, un rapport sur leurs orientations budgétaires, leurs engagements pluriannuels et leur gestion de la dette. Pour les villes de plus de 10 000 habitants, le rapport devra présenter les structures et perspectives d’évolution des effectifs et détailler les dépenses de personnel envisagées (rémunérations, mais aussi avantages en nature, temps de travail). Tous ces rapports devront être rendus publics sur les sites internet des collectivités concernées.
Enfin, toute opération d’investissement d’un montant supérieur à un seuil fixé par décret devra être assortie d’une étude d’impact pluriannuelle sur son coût de fonctionnement.

n°693

30 Avril 2014

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