Dans plusieurs décisions rendues en fin d’année dernière (décisions n° 2017-758 DC, n° 2017-759 DC et n° 2017-756 DC du 28 décembre 2017), le Conseil constitutionnel s'est prononcé sur le contenu de la loi de finances pour 2018, de la seconde loi de finances rectificative pour 2017, et de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2018, lois contestées par trois recours de l’opposition parlementaire.
La réforme du prélèvement à la source, la transformation de l’ISF en impôt de solidarité sur la fortune immobilière (IFI), et la réforme de la CSG, ont été déclarées conformes à la Constitution, de même que, pour les collectivités, la suppression de la taxe d’habitation.
Se prononçant sur les griefs formulés contre l'article 5 de la loi de finances pour 2018, qui instaure un nouveau dégrèvement - pris en charge par l'État - de la taxe d'habitation perçue par les communes et leurs EPCI à fiscalité propre, le Conseil constitutionnel a estimé cette réforme conforme à la Constitution. En effet, le taux de ce dégrèvement, « dont le bénéfice est subordonné à une condition de revenus des contribuables », est fixé à 30 % du montant de la taxe d'habitation dû en 2018, 65% en 2019 et 100% au-delà. A compter de 2020, environ 20% des contribuables resteront assujettis à cette taxe.
Le dégrèvement respecte l’égalité entre contribuables
Vis-à-vis du respect du principe d'égalité devant les charges publiques, le Conseil constitutionnel relève que les dispositions contestées « ont été présentées au Parlement comme constitutives d'une étape dans la perspective d'une réforme plus globale de la fiscalité locale, et que le législateur a entendu diminuer l'imposition à la taxe d'habitation de la plus grande part de la population ».
S'il n'a pas réduit l'ensemble des disparités de situation entre contribuables soumis à la taxe d'habitation, « le législateur s'est fondé, en retenant comme critère d'éligibilité au nouveau dégrèvement un plafond de revenu en fonction du quotient familial, sur un critère objectif et rationnel, en rapport avec l'objet de la loi ».
La décision du Conseil constitutionnel valide donc cette disposition, mais prévoit la possibilité pour lui de réexaminer ces questions en fonction notamment de la manière dont sera traitée la situation des contribuables restant assujettis à la taxe d'habitation dans le cadre d'une réforme annoncée de la fiscalité locale.
Pas d’atteinte à l’autonomie financière
Vis-à-vis du respect de l'autonomie financière des collectivités territoriales (combinaison des articles 72-2 de la Constitution et L.O. 1114-2 du code général des collectivités territoriales), le Conseil constitutionnel rappelle que la loi autorise - en matière de ressources propres - la fixation de l'assiette, le taux ou le tarif ou qu'elle en détermine, par collectivité, le taux ou une part locale d'assiette, mais encore lorsqu'elle procède à une répartition de ces recettes fiscales au sein d'une catégorie de collectivités territoriales.
En l'espèce, le dégrèvement contesté est entièrement pris en charge par l'État sur la base des taux globaux de taxe d'habitation applicables en 2017, si bien que le Conseil constitutionnel estime que n’est pas affecté l'assiette de cette taxe, ni remis en cause son caractère local. Les communes demeurent libres de fixer un taux de taxe d'habitation différent, auquel les bénéficiaires du dégrèvement seront d'ailleurs assujettis, pour la part supérieure au taux applicable en 2017.
Précision qui reste importante, le Conseil constitutionnel rappelle que s'il apparaissait, en raison de l'évolution des circonstances, et notamment par l'effet d'une modification des dispositions contestées, éventuellement conjuguée à d'autres causes, « que la part des ressources propres dans l'ensemble des ressources des communes devenait inférieure au seuil minimal de ressources propres déterminé par l'article L.O. 1114-3 du code général des collectivités territoriales, il appartiendrait à la loi de finances pour la deuxième année suivant celle de ce constat d'arrêter les mesures appropriées pour rétablir le degré d'autonomie financière des communes au niveau imposé par le législateur organique ».
Dispositions censurées
Le Conseil constitutionnel a en revanche censuré comme contraire au principe d'égalité devant les charges publiques l'article 85 de la LFI pour 2018 annulant l'intégralité du transfert de ressources opéré par l'article 89 de la loi de finances pour 2016 pour le seul cas de la métropole de Lyon et de la région Auvergne-Rhône-Alpes, le législateur ne s'étant pas fondé sur des critères objectifs et rationnels en rapport avec le but qu'il s'est proposé.