La transition écologique fut au cœur des campagnes municipales et va faire l’objet de nouveaux projets dans les villes de taille moyenne et leurs intercommunalités. Le plan de relance crédite 30 milliards d’euros pour la transition écologique dont de nombreux crédits pour les territoires comme les 1,3 milliards d’euros pour la rénovation énergétique des bâtiments publics des collectivités. Les futurs contrats de relance et de transition écologique (CRTE) porteront l’appui de l’État aux projets de territoire. Ondes urbaines, newsletter de l’association Villes de France, revient sur les enjeux de transition écologique portés par les maires de villes moyennes et les présidents d’intercommunalités.
Trois questions à Madame Frédérique Macarez, maire de Saint-Quentin, présidente de la CA du Saint-Quentinois, vice-présidente de Villes de France
Quels sont selon vous les enjeux majeurs de la transition écologique dans les villes moyennes et leurs intercommunalités ?
C’est d’abord une question de responsabilité vis-à-vis de nos habitants, aujourd’hui et demain.
Pour chaque échelle de l’action publique, la transition écologique pose une équation compliquée, puisqu’il s’agit de trouver un équilibre entre efficacité économique, équité sociale et intégrité environnementale.
Pour une ville moyenne, le défi de la transition écologique se pose d’abord en termes économiques : il s’agit au préalable d’établir les incitations économiques pertinentes pour modifier efficacement les choix des citoyens. Les dispositifs déployés par l’Etat, qu’il s’agisse des plans de « relance verte » ou encore du fléchage de l’épargne vers l’investissement vert, doivent pouvoir trouver une application adaptée aux spécificités de chaque territoire.
Dans un contexte sanitaire et financier très tendu, la dimension incitative semble incontournable pour réduire localement les pollutions et les atteintes à l’environnement, en agissant notamment sur la fiscalité verte.
Par ailleurs, il est important de rappeler que les collectivités locales portent environ 67% de l'investissement public. Les villes moyennes ont donc un rôle majeur à jouer pour créer un écosystème favorable aux investissements verts et durables.
Enfin, la transition écologique dans les villes moyennes est liée à un enjeu fort de gouvernance : elle doit se traduire par une participation accrue des citoyens aux politiques environnementales locales, un accompagnement des entreprises et la décentralisation des politiques publiques.
Pouvez-vous présenter une initiative de votre collectivité que vous souhaiteriez partager ?
Saint-Quentin s’efforce d’appliquer concrètement et au quotidien, les objectifs de développement durable. La réflexion se construit avec les Saint-Quentinois, à travers des démarches innovantes de concertation : « Saint-Quentin 2050 : l’avenir est dans nos mains » en est une illustration. En 2018, 2582 contributions ont été recueillies, au terme de 6 mois de débats, auprès des Saint-Quentinois, pour construire ensemble l’avenir de Saint-Quentin.
La Ville est attachée à construire l’urbanisme de demain, un urbanisme durable et innovant. A titre d’exemple, le déploiement de la chaufferie biomasse au sein de notre collectivité matérialise la transition écologique du chauffage urbain. Alimentant le réseau de chaleur urbain, la chaufferie est équipée de deux chaudières à bois permettant la couverture sur l’année d’une large gamme de puissance en associant l’une, l’autre ou les deux chaudières à bois. Le bois utilisé pour ce processus est un bois local. A moyen terme, la collectivité souhaite étendre ce réseau de chaleur urbain sur plusieurs sites stratégiques de la ville.
Les atouts de la biomasse sont à la fois écologiques et économiques : il s’agit d’une source d’énergie renouvelable et le coût du bois énergie est nettement inférieur à celui du gaz naturel ou du fuel domestique.
Au surplus, la biomasse bénéficie d’une règlementation et d’une fiscalité favorables ainsi que du soutien de l’ADEME. Enfin, la filière bois dispose d’un grand potentiel estimé à plus de 20 millions de tonnes de bois par an.
En tant qu’élu local, quelles sont vos attentes vis-à-vis des institutions pour faciliter la transition écologique dans les territoires ?
Dans la continuité de la loi Energie Climat et de la Convention Citoyenne pour le Climat dont les fondations ont été
posées en 2020, les élus locaux exigent des réponses claires et harmonisées dans la gestion de la transition écologique : comment appréhender cette problématique en temps de crise ? Y a-t-il un consensus sur les actions à entreprendre ? Comment prendre en considération la situation économique contrastée des territoires ?
La clarification à l’endroit des collectivités est donc en premier lieu essentielle.
Une lutte efficace contre le changement climatique nécessite des instruments économiques adaptés, dont l’efficacité est aujourd’hui discutée parmi les élus locaux : tout d’abord, les instruments déployés au niveau national sont susceptibles d’introduire des distorsions locales et d’engendrer des situations sous-optimales localement (havres de pollution, fuites de carbone…) et induire à terme des effets négatifs sur la compétitivité.
Par ailleurs, les indicateurs nationaux et la mise en place de la régulation nationale par la réglementation, les prix ou les quantités, peuvent également avoir une efficacité contrastée sur les divers territoires.
Enfin, pour faciliter la transition écologique dans les territoires, il est plus que jamais nécessaire de renforcer la péréquation territoriale pour la transition énergétique. Nous espérons que les futurs contrats de relance et de transition écologique en seront la traduction concrète.