ONDES
URBAINES

Ondes urbaines n°332 -

Quatre questions à Claire Rais Assa, chef de projet Transition écologique et territoires, France Stratégie



Villes de France renouvelle sa newsletter Ondes urbaines avec chaque semaine une interview d’un élu, un partenaire ou un expert. Alors que le programme Action Cœur de ville a mis l’accent sur les villes de taille moyenne afin d’œuvrer à la redynamisation des centres-villes, la crise sanitaire a révélé l’attractivité de ces territoires pour les citoyens. Ainsi, le baromètre des territoires, réalisé par Villes de France, l’ANCT et la Banque des territoires à l’été 2021 montre que 87% des Français préfère vivre dans une ville moyenne que dans une métropole. Cette semaine, Claire Rais Assa, chef de projet Transition écologique et territoires à France Stratégie revient sur les études de France Stratégie consacrées aux villes moyennes.

Quels sont les principaux enseignements de vos études quant aux dynamiques territoriales dans les villes moyennes ? Quels enjeux partagés par ces villes ?
Le travail a été mené sur un panel de 202 villes moyennes en France, représentant environ 35 % de la population et 31 % des emplois. A l’échelle de l’aire d’attraction de ces villes, leurs trajectoires ces 10 dernières années sont plutôt dynamiques sur les plans de la démographie, de l’emploi et des prix de l’immobilier : 42 % d’entre elles ont ainsi connu des trajectoires plus dynamiques que la tendance nationale et 30 % d’entre elle ont suivi la tendance nationale. Seule 16 % d’entre elles, une minorité, ont connu des trajectoires en retrait de la tendance nationale. En terme de géographie, on retrouve des effets bien connus comme l’attractivité générale des littoraux et de l’ouest de la France. Ces tendances ne sont pas les mêmes si l’on s’intéresse aux pôles urbains ou aux couronnes : en particulier la croissance de l’emploi et de la démographie s’est concentrée dans les couronnes ces 10 dernières années. Ainsi, 45 % des villes étudiées présentent même une croissance de la population de leur couronne alors que le pôle connaissait une baisse de population. Enfin, notre étude souligne le rôle central joué par les villes moyennes à l’échelle locale, notamment en ce qui concerne l’accès de la population du territoire aux équipements et aux services (par exemple les commerces, l’offre de santé, de transports ou encore d’éducation).

Comment la pandémie a-t-elle impacté ces dynamiques ?
Pour savoir caractériser finement l’effet de la pandémie et sa pérennité, il faudra disposer d’un peu plus de recul et de données consolidées. On peut tout de même déjà noter que les villes moyennes ont connu une période de création d’emploi pendant la pandémie avec une croissance de l’emploi salarié privé qui a atteint +2,3 % entre le troisième trimestre 2019 et le troisième trimestre 2021. Ainsi, 160 villes sur les 202 étudiées ont créé de l’emploi pendant la pandémie. En moyenne, le choc conjoncturel a été mieux absorbé par les territoires qui connaissait des trajectoires dynamiques avant la crise. Par ailleurs, quelques fléchissements de tendance peuvent aussi être observés avec des villes moyennes ayant créé plus de 3 % d’emploi pendant la pandémie alors qu’elles connaissaient des trajectoires en retrait auparavant. En ce qui concerne les prix de l’immobilier, les données mobilisées (uniquement sur l’année 2020) semblent suggérer que les pôles des villes moyennes auraient mieux profité de la hausse générale des prix lors de la pandémie mais cela reste à confirmer.

Quelles recommandations pour exploiter pleinement le potentiel de ces collectivités ?
Sur la base de ce diagnostic, nous formulons plusieurs axes d’action et recommandations. Tout d’abord, la grande variété des trajectoires des villes moyennes invite à privilégier un accompagnement différencié, tenant compte des

 

spécificités et des enjeux de chacune. En particulier, les territoires concentrant des vulnérabilités multiples pourraient faire l’objet d’un ciblage dédié. Par ailleurs, nous recommandons de mobiliser et renforcer les dispositifs de politiques publiques existants plutôt que d’en créer de nouveau. En effet, ces derniers sont nombreux et leurs intersections multiples ce qui souligne l’intérêt de renforcer leur articulation. Pour y parvenir, nous recommandons de renforcer l’analyse territoriale et d’améliorer la connaissance territoriale en appui à la décision : cela nécessite notamment l’amélioration continue des données et indicateurs spatialisés, en particulier sur des sujets opérationnels ou en lien étroit avec les transitions à venir.

Quelle place des villes moyennes dans les démarches de transition écologique du pays ?
Les villes moyennes font chacune face à des enjeux spécifiques qu’on parle par exemple de consommation d’espaces agricoles, naturels ou forestiers, de dépendance à la voiture pour les mobilités du quotidien ou encore d’adaptation aux effets variables dans l’espace du changement climatique. Dès lors, elles ont un rôle certain à jouer dans la mise en œuvre de la transition écologique. Pour répondre à ces défis majeurs, les villes moyennes apparaissent bien placées pour jouer un rôle dans la mise en place de démarches de coopération entre territoires, avec l’objectif de trouver des réponses communes. Nous recommandons donc notamment que les politiques publiques privilégient le soutien à des actions conçues localement et à même de faciliter la déclinaison des objectifs nationaux dans les territoires.

n°332

10 Fév 2022

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