94 rue de Sèvres 75007 Paris

Ondes Urbaines

Economie

Le pilotage par la performance gagne le Sénat


Gérard Larcher s’y était engagé lors de son élection à la Présidence du Sénat en 2014 : d’ici 2017, le Sénat devra s’adapter pour mieux répondre « aux nouvelles exigences de l’action publique », et redonner aux citoyens les raisons d’avoir confiance dans cette institution de la République.
Ondes urbaines revient ici sur les conclusions rendues début mars par les deux groupes de travail mis en place à cet effet.
Trois axes de réformes sont envisagés pour moderniser le Sénat
La réforme du Sénat s’articulera autour de trois défis majeurs : (1) renforcer la participation aux travaux sénatoriaux,  (2) légiférer et contrôler plus efficacement et (3) garantir la transparence financière et une gestion exigeante. Sur ce dernier point, le Président du Sénat envisage de réviser l’ordonnance organique de 1958 qui fixe les moyens mis à la disposition des parlementaires. Le montant, la nature, l’objet des indemnités et leur fiscalisation devraient être réexaminées, ainsi que les droits et devoirs et l’usage qui est fait des ressources publiques dont disposent les parlementaires pour leur assurer l’indépendance nécessaire.
Renforcer la participation aux travaux sénatoriaux
Une réorganisation des travaux des sénateurs permettra de renforcer l’assiduité des sénateurs aux travaux essentiels du Sénat, la présence de l’élu dans son Institution étant jugée « indispensable ».
La réforme doit réduire la dispersion des sénateurs dans de multiples instances : séances publiques, commissions législatives, auditions, participation à des organismes extra-parlementaires.
Désormais, le Sénat veillera à « éviter la dispersion des sénateurs dans les activités non directement liées aux travaux législatifs et de contrôle » : groupes d’études, organismes extra parlementaires, groupes d’amitié. Les dispositions imposant la participation de sénateurs « dans les organismes où leur présence n’apparaît pas indispensable » fera l’objet d’une réflexion avec le Gouvernement.
La priorité sera donnée à la présence lors des votes solennels (dont le champ est étendu à l’ensemble des textes jugés importants) et dans les séances de commissions où sont examinés les textes de loi, pour garantir la qualité des textes. Chaque sénateur ne pourra être porteur que d’une seule délégation de vote. La semaine de travail sera réorganisée de façon à éviter les chevauchements de séances. Un tableau des activités et des présences de chaque sénateur sera publié sur le site du Sénat pour les journées du mardi, du mercredi et du jeudi (incluant les séances plénières, réunions des commissions, missions d’information et commissions d’enquête et les réunions internationales). Un nouveau dispositif de retenues financières sera appliqué à partir du 1er octobre 2015, en cas d’absences répétées. Il portera à la fois sur l’indemnité de fonction et sur l’indemnité représentative de frais de mandat (IRFM), pouvant aller jusqu’à la suppression totale de l’indemnité de fonction et la baisse de 50% de l’IRFM pendant trois mois, selon les cas.
Mieux élaborer la loi et exercer le contrôle parlementaire
« Pour être en phase avec les nouvelles contraintes de l’action publique, le Sénat doit à la fois travailler plus vite et mieux », ont répété les rapporteurs du groupe de travail Roger Karoutchi et Alain Richard. Une meilleure organisation du travail parlementaire a donc été proposée, dont les grandes lignes sont retracées ici :
- Accepter, chaque fois que ce sera nécessaire, un transfert de temps d’examen des semaines d’initiative gouvernementale vers les semaines d’initiative parlementaire, tout en respectant les priorités assignées à ces semaines parlementaires (contrôle et initiative). Cette réorganisation permettra de fluidifier et d’accélérer les débats parlementaires sur les textes importants, sous le contrôle de la conférence des Présidents.
- Alléger la séance publique et renforcer le travail en commission dont certaines séances seront publiques. Une procédure d’examen en commission, dans laquelle le droit d’amendement s’exercera exclusivement en commission, sera expérimentée.
- Cadrer les temps de parole et améliorer la prévisibilité des délais d’examen en séance par la recherche d’un temps législatif concerté. La conférence des Présidents fixera, pour chaque grand texte de loi, la date de fin des débats et la répartition des temps de débat pour chacune des principales subdivisions de ces textes, en veillant à assurer une équitable répartition des temps de parole entre tous les groupes politiques.
- Organiser une séance de Questions au Gouvernement (QAG) par semaine et supprimer les Questions Cribles Thématiques (QCT).
Garantir la transparence financière et une gestion exemplaire
Les rapporteurs des groupes de travail ont d’abord tenu à rappeler leur méfiance par rapport au « dogme de la transparence », qui cacherait en réalité une certaine forme d’antiparlementarisme. Selon eux, « la démocratie a un coût. Les parlementaires français sont dans la norme de leurs collègues Européens. Leurs indemnités sont comparables ». Cette précision étant faite, 5 volets de propositions ont été explorés pour améliorer la transparence en matière financière :
a) le budget du Sénat fera l’objet de plus de transparence et d’une meilleure lisibilité pour être accessible à tous.
Il sera ainsi soumis, avant sa publication sur le site Internet du Sénat, à un pré-test auprès d’un panel de citoyens. La commission spéciale chargée du contrôle des comptes aura des prérogatives plus étendues (contrôles sur pièces et sur place des comptes de l’ensemble des services du Sénat).

 

Le règlement budgétaire et comptable sera révisé d’ici le 31 décembre 2015 pour tenir compte de ces nouvelles dispositions et des recommandations faites par la Cour des Comptes dans le cadre de sa mission de certification, notamment en matière de contrôle interne. Les logements de fonction sont supprimés (à l’exception d’un appartement de permanence pour le Président du Sénat et les logements pour nécessité de service du commandant militaire et du médecin).
b) le statut et les finances des groupes politiques
c) du régime de l’indemnité représentative des frais de mandat (IRFM)
2) Le statut et les finances des groupes politiques.
Les comptes des groupes politiques seront publiés sur le site Internet du Sénat dès l’exercice 2015. La possibilité dont disposent les sénateurs de transférer au groupe politique auquel ils appartiennent une fraction des crédits mis à leur disposition pour rémunérer leurs collaborateurs fera l’objet d’une traçabilité garantissant la stricte affectation de ces crédits transférés aux dépenses salariales des groupes politiques. La liste des collaborateurs de chaque sénateur sera publiée sur le site Internet du Sénat.
3) Le régime de l’indemnité représentative des frais de mandat (IRFM)
Afin de mettre fin aux « questionnements récurrents » dont l’IRFM fait l’objet, le Sénat propose d’élaborer un référentiel de l’utilisation de l’IRFM, pour définir les catégories de dépenses imputables sur l’IRFM et les bonnes pratiques qui devront être respectées. Le Président du Sénat, à la demande des Questeurs ou à son initiative, pourra saisir le Comité de déontologie de toute demande d’éclaircissement relative à l’utilisation par un sénateur de son IRFM et décider, si nécessaire, de saisir le Bureau du Sénat. L’utilisation de l’IRFM est désormais interdite pour l’acquisition de tout bien immobilier. Cette disposition prend effet à compter du 1er avril 2015 et s’appliquera, à compter du 31 décembre 2015 sur les emprunts en cours. Le reliquat non utilisé sera obligatoirement restitué au Sénat.
4) La Dotation d’Action Parlementaire (DAP)
La Cour des Comptes a relevé un certain nombre de problèmes concernant la gestion de la DAP (56 M€ au total pour le Sénat). « Elle devra évoluer, être mieux encadrée même si elle correspond à une réelle attente des élus locaux et donc des citoyens  (l’éclairage d’un stade de football, l’acquisition de matériel informatique, la réfection d’une toiture d’une école maternelle) ».
Des mesures seront adoptées dès 2015 pour en clarifier l’utilisation et en publier les affectations, en open data sur le site internet du Sénat. A terme, c’est l’ensemble du mode de gestion de ces crédits qui est appelé à évoluer. Des règles strictes sont instituées s’agissant des aides apportées aux collectivités territoriales, fixées par le Ministère de l’intérieur (privilégier les projets présentant un caractère exceptionnel et d’intérêt général, accorder un taux de subvention minimal de manière à éviter une trop grande dispersion des aides, éviter les subventions répétées à une même commune sauf s’il s’agit de faibles montants ou dans le cas d’un projet pluriannuel...). De même, des règles doivent être respectées s’agissant des aides aux associations. 
A cet égard, une mission a été confiée à la présidente et au rapporteur général de la commission des finances du Sénat pour proposer un nouveau cadre juridique d’attribution des subventions aux collectivités territoriales et aux associations au titre de la dotation d’action parlementaire ainsi que de la réserve ministérielle, « de manière à promouvoir un dispositif d’ensemble plus transparent, plus efficace et au coût de gestion mesuré ».
5) Gestion des ressources humaines : une attention soutenue
Trois sénateurs et trois personnalités qualifiées réaliseront un bilan de la réforme de l’administration du Sénat de 2010. Le Sénat peut d’ores et déjà affirmer que sa masse salariale a diminué entre 2009 et 2014 de 12%, soit une économie de 14,2 M€.

n°35

01 Avril 2015




Directeur de la publication
Gil Avérous

Directeur délégué de la publication
Jean-François Debat

Rédacteur en chef
Guillaume Ségala

Rédaction
Armand Pinoteau, Margaux Beau, Anaëlle Chouillard

Secrétariat
Anissa Ghaidi