Habitat III est la troisième conférence des Nations Unies sur le logement et le développement urbain durable. Vingt ans après la conférence Habitat II à Istanbul, Habitat III devrait être un événement majeur sur la problématique des villes au niveau international, dans un contexte marqué par les nouveaux défis de l’urbanisation. Cette conférence Habitat III se tiendra à Quito (Équateur) du 17 au 20 octobre 2016 sur le thème : « le développement urbain durable : l’avenir de l’urbanisation ? ». L’association Villes de France a été conviée le 29 septembre au MAEDI pour une réunion du Partenariat français pour la ville et les territoires (PFVT) sur la préparation de l’événement. L’avant dernière version de la Déclaration du Nouvel agenda urbain a été présentée aux participants, avec un éclairage sur le point de vue de la diplomatie française sur les avancées et les derniers les points de blocage de la négociation.
Une négociation en phase d’achèvement
Après la publication à Surabaya (en Indonésie) d’un pré-projet du « Nouvel agenda urbain » en Juillet 2016, une nouvelle version du texte a été finalement négociée lors de la réunion intergouvernementale informelle Habitat III qui a eu lieu au siège des Nations Unies à New York du 7 au 10 Septembre 2016. Cette déclaration sera ainsi adoptée à Quito le 20 octobre par les États membres dans sa version définitive. Non contraignante, elle sera néanmoins décisive pour l’élaboration des politiques nationales. Les priorités formulées et les vocabulaires utilisés dans cet agenda urbain seront repris ensuite par les Nations Unies, comme par la plupart des organismes mondiaux et européens pour traiter du fait urbain, notamment pour élaborer les axes des grands appels à projets. En effet, la déclaration présentera des lignes directrices pour les programmes et les actions mises en œuvre en matière de développement urbain durable. Au cours des échanges préparatoires du mois de septembre, la question de l’avenir de la conférence Habitat III a notamment été posée. En effet, le grand reproche fait aux deux précédentes conférences Habitat I (Vancouver,1976) et Habitat II (Istanbul, 1996), est le manque de suites concrètes apportées à ces textes. Dans ce projet de texte de déclaration finale, la France a plaidé pour que « l'agenda urbain » soit un « agenda pour l'action ». Il a été exigé, dans cette déclaration de Quito, un programme d'action pour la mise en œuvre de cet agenda.
Les avancées selon la diplomatie française
Cependant sur l'organisation institutionnelle, divers consensus importants sont d’ores et déjà à signaler. Il est acté la notion de suivi et de « reportage » du nouvel agenda urbain. Il s’agit d’un point tout à fait crucial, selon la diplomatie française, car il y aura désormais des rapports tous les quatre ans, et les acteurs seront consultés en amont. Ce serait l’un des succès d’Habitat III car ces rapports quadriennaux seraient présentés devant le Forum politique de haut niveau (HLPF), soit la plateforme centrale des Nations Unies dédiée au suivi et à l’évaluation des Objectifs de développement durable (adoptés lors du Sommet des Nations Unies sur le développement durable qui s’est tenu le 25 septembre 2015). Autre point perçu comme positif, l’idée de la coordination des différentes agences des Nations Unies concernant concernant l'habitat durable serait validée. Ce serait là aussi une autre nouveauté tout à fait conséquente, et saluée comme telle par la diplomatie française. Enfin concernant l'interface entre l’ONU avec les
réseaux des collectivités locales, il faut noter la citation, tout à fait exceptionnelle dans les documents des Nations Unies, aux instances représentatives des collectivités territoriales (associations mondiales d’élus). La diplomatie française est ainsi plutôt satisfaite de voir citée, dans le texte de la Déclaration de Quito, la référence explicite aux réseaux mondiaux de collectivités locales, comme le Forum urbain mondial (FUM), ou « l’assemblée mondiale des gouvernements locaux et régionaux » (World Assembly of Local and Regional Governments) réunissant des réseaux d’associations mondiales d’élus locaux. Enfin, l’autre mission sensible de cette conférence de Quito sera aussi de préfigurer l'avenir d’ONU habitat, le programme des Nations Unies pour les établissements humains, en donnant un mandat de travail plus précis et plus réaliste à cette organisation. Il y aura donc une évaluation indépendante de cette agence spécialisée de l'ONU, créée en 1978 et dont le siège est à Nairobi (Kenya). Son mode de gestion et sa relation avec ses partenaires ont vocation à être intégralement revus. Théoriquement, il serait ainsi décidé une refonte profonde de l’institution, avec contours adoptés lors de deux « journées ministérielles de haut niveau » des Nations Unies en juin 2017. Un rapport serait ensuite issu de ces journées de travail et présenté à l'Assemblée générale des Nations Unies pour une décision sur l'avenir d’ONU habitat.
Les points faisant encore l’objet de débat
Depuis la première version du mois de mai 2016 (Zero Draft), de nombreux sujets étaient perçus par les différentes parties prenantes comme polémiques dans le projet de texte de la déclaration Habitat III soumis à la négociation des Nations Unies à l'instar des références explicites relatives aux droits de l’homme, aux migrants, aux « droits sexuels et reproductifs », à la famille, à l'aide publique au développement, ou à la décentralisation. Ces difficultés de rédaction seraient aujourd’hui surmontées, notamment depuis septembre dernier, avec de nombreux ajouts. Toutefois, concernant le texte finalement issu de cette négociation, la France a pu regretter des mentions encore présentes dans le texte dans sa dernière version avant la conférence. D'une part, la France voit plutôt comme une faiblesse de ce texte en cours de négociation de la référence dans la dernière version du « Draft » au concept controversé de « différenciation », ou plus précisément à la CBDR ("Common But Differentiated Responsability"), qui reste l’un des principes inscrits dans la Déclaration de Rio de 1992. En effet, selon ce principe, très contesté par de nombreux Etats, les efforts des différents pays doivent être modulés en fonction de leur responsabilité historique (les pays qui se sont industrialisés plus tôt et qui ont contribué depuis plus longtemps à la dégradation de la planète doivent faire plus d'efforts), et des moyens techniques et financiers dont ils disposent.D’autre part, la référence explicite à la « déclaration des Nations Unies sur le droit au développement » de 1986 qui suscite l’opposition de nombreux pays occidentaux dans sa formulation actuelle dans le texte (« Right to Development »), notamment du fait de son caractère beaucoup trop imprécis en droit international public, et juridiquement peu applicable concrètement. La conférence de Quito devrait être le lieu de la négociation finale sur ces derniers points sensibles.
Le site de la conférence Habitat III