La transition écologique fut au cœur des campagnes municipales et va faire l’objet de nouveaux projets dans les villes de taille moyenne et leurs intercommunalités. Le plan de relance crédite 30 milliards d’euros pour la transition écologique dont de nombreux crédits pour les territoires comme les 1,3 milliards d’euros pour la rénovation énergétique des bâtiments publics des collectivités. Les futurs contrats de relance et de transition écologique (CRTE) porteront l’appui de l’Etat aux projets de territoire. Ondes urbaines, newsletter de l’association Villes de France,
revient sur les enjeux de transition écologique portés par les maires de villes moyennes et les présidents d’intercommunalités.
Trois questions à Jean-François Debat, maire de Bourg-en-Bresse, président de l’agglomération de Bourg-en-Bresse, président délégué de Villes de France
Quels sont selon vous les enjeux majeurs de la transition écologique dans les villes moyennes et leurs intercommunalités ?
Je perçois trois enjeux majeurs pour nos territoires de taille moyenne. Le premier enjeu porte sur la transition énergétique, qu’il s’agisse de rénovation du patrimoine municipal plutôt que la construction de nouveaux équipements, de soutien à la production d’énergies renouvelables (solaire, éolien, méthanisation, hydrogène…) ou de soutien à la rénovation énergétique des logements.
Le deuxième axe fort concerne la mobilité. La transition écologique implique une intensification des usages alternatifs à l’autosolisme, notamment via des réseaux vélos sécurisés et les transports collectifs. Les déplacements domicile-travail mais aussi les déplacements au cours de la journée de travail doivent être considérés dans les politiques locales de mobilité. Dans mon agglomération de Bourg-en-Bresse, les transports en commun desservent la ville tandis que les territoires ruraux fonctionnent en transport à la demande. C’est essentiel de penser l’équité entre ces territoires. Quant à la gratuité des transports, elle est intéressante lorsqu’elle permet d’amener de nouveaux usagers dans le bus. Cela doit se coupler avec une politique d’urbanisme pour que les transports en communs soient aussi voire davantage attractifs que la voiture.
Enfin, le troisième enjeu porte sur la protection de la biodiversité et la gestion des ressources. Ainsi pour Bourg-en-Bresse, l’objectif de zéro artificialisation nette (ZAN) est plus ambitieux que celui de l’Etat car l’horizon visé est 2030 et non 2050. 70 hectares sont redevenus des espaces naturels. Les territoires sont aujourd’hui amenés à raisonner à l’intérieur de l’empreinte urbaine. Dans l’agglomération, 55 % de l’emprise au sol concerne l’habitat, 30% les entreprises et le reste concerne les bâtiments publics. Avec 90% des emplois créés dans l’agglomération de Bourg-en-Bresse qui sont endogènes, l’enjeu est d’accompagner les entreprises à construire sur l’existant soit en supprimant du stationnement et en s’appuyant sur les parkings ou emplacements du territoire soit en construisant dans la verticalité pour réduire la consommation de nouveaux terrains. De même pour l’habitat, les architectes joueront un rôle fondamental afin de penser une nouvelle forme d’habitat comme des maisons mixtes. Enfin, les villes moyennes et leurs intercommunalités peuvent s’appuyer sur les friches et repenser les usages des bâtiments.
Pouvez-vous présenter une initiative de votre collectivité que vous souhaiteriez partager ?
Bourg-en-Bresse a obtenu le second prix pour notre strate de collectivités (20 000-50 000 habitants) au palmarès des villes cyclables de 2019 de la Fédération des Usagers de la Bicyclette. J’ai souhaité développer les réseaux de vélo sécurisés même, dans les années à venir, sur les grands boulevards mais aussi l’accès aux vélos en libre-service, ce qui permet de réduire l’usage des voitures pendant les journées de travail. La question de la place de la voiture se pose. Nos territoires doivent équilibrer l’espace accordé à chaque mobilité, chacune doit avoir ses propres voies. Nous menons une étude sur les pénétrantes urbaines, afin que chaque mode et notamment le vélo trouve sa place sur la voirie. Enfin, nous étudions des aides à l’achat de vélos classiques ou électriques pendant 18 mois. La moitié des déplacements est inférieure à 1 km. Si les usages de la voiture se limitaient à certaines situations comme la présence de plusieurs personnes dans le véhicule, les achats, les déplacements de plus de 3 km ou encore les situations météorologiques défavorables, il serait possible de diviser par 4 les déplacements en voiture. L’enjeu est de rendre possible le déclic pour les citoyens.
En tant qu’élu local, quelles sont vos attentes vis-à-vis des institutions pour faciliter la transition écologique dans les territoires ?
Les élus locaux ne peuvent pas porter à eux seuls la transition écologique. Des politiques doivent être menées au niveau national et européen notamment pour gérer les impacts de la mondialisation et de la surconsommation. Au niveau européen, un engagement doit être pris pour que le prix du carbone rende plus rentable la relocalisation des entreprises.
J’attends aussi des engagements de l’Etat pour la transition énergétique, l’économie circulaire et l’agriculture. Concernant la transition énergétique, la rénovation énergétique des logements en particulier doit provenir d’une impulsion nationale mais les choix actuels sont trop timides, les moyens ne sont pas à la hauteur des enjeux. Les objectifs sont de 700 000 logements mais le stade des 150 000 logements est difficilement atteint. Concernant les déchets, les collectivités n’ont pas de marge de manœuvre, une mesure nationale doit être prise pour limiter les emballages et favoriser le réemploi. Enfin, concernant l’agriculture, les collectivités sont également impuissantes face à la suppression des haies bocagères ou l’usage de pesticides. Des règles doivent être prises au niveau de l’État.
Au niveau régional, en tant qu’élu local, je demande une harmonisation des objectifs zéro artificialisation nette (ZAN) au sein des SRADDET et de les rendre opposables. L’enjeu est une équité entre les territoires, il est difficile de porter une ambition lorsque les territoires alentour n’ont pas les mêmes règles.