ONDES
URBAINES

Ondes urbaines n°331 -

Quatre questions à Pierre Coppey Président de la Fabrique de la Cité



Quelle est votre vision prospective de la ville moyenne en France ?
L’enquête menée par Kantar/Potloc en novembre 2020 pour le compte de la Fabrique de la cité a mis en évidence l’image positive dont la ville moyenne bénéficie auprès des Français, loin de l’image d’une ville en déclin ou d’une ville où l’on s’ennuie.
Elle est perçue comme une ville où les services de proximité sont satisfaisants, où l’accès à la nature est toujours possible. Ces territoires urbains de taille intermédiaire apparaissent donc comme plus adaptés aux besoins des familles et c’est sans doute une des motivations profondes qui pousse certaines d’entre elles à changer de vie et à changer de ville. Toute la question est de savoir si nous assistons à un phénomène durable au point de parler d’un véritable exode urbain en faveur de ces villes.
En fonction de leur taille, de leur place dans l’espace régional, de leur système productif ou de leur connexion aux autres territoires, elles pourraient connaître des trajectoires positives.
Elles sont confrontées à de nombreux défis : revitalisation des cœurs de ville, rénovation de logements, préservation de l’emploi et des services de proximité etc…mais elles bénéficient d’un regain d’intérêt de la part de l’Etat qui les accompagne avec des programmes spécifiques comme Action Cœur de Ville.
Il est donc envisageable que ces « villes d’équilibre » comme les nomme le maire de Cahors Jean-Marc Vayssouve-Faure, jouent dans l’avenir un rôle structurant dans le maillage urbain français en complémentarité avec les grandes métropoles.

Concurrence, coopération : quels chemins effectifs pour le développement des villes moyennes ?
La coopération entre les villes ou la coopération entre les différents niveaux de collectivités n’est pas une question nouvelle. La récente pandémie avec ses confinements successifs, a cependant fait émerger dans le débat public le désir pour les habitants des grands centres urbains, de vivre dans des villes moins congestionnées et plus proches de la nature, introduisant ainsi l’idée d’une forme de revanche des villes moyennes face aux métropoles.
Le développement du télétravail a également contribué à faire émerger provisoirement de nouveaux rythmes professionnels et de nouveaux modes de vies plus compatibles avec des localisations lointaines des sièges des entreprises.
Ces récentes évolutions posent la question d’un rééquilibrage territorial entre les villes moyennes et les grandes métropoles plutôt que celle d’une opposition entre les territoires. Les métropoles doivent continuer de porter une dynamique économique, universitaire ou culturelle dont le bénéfice s’étend à l’ensemble d’un bassin socio-économique. Et les villes voisines ont quant à elles une carte à jouer dans de nombreux domaines : campus connectés, tourisme, productions alimentaires mais aussi logement et économie si l’on songe à la rareté du foncier dans les grands ensembles urbains (cf Session 1 Rencontres de villes moyennes à Cahors).
Les acteurs locaux y sont prêts. Ils rappellent bien sûr la nécessité d’avoir une organisation des mobilités performante, un équipement numérique territorial efficace et des outils contractuels adaptés. On ne peut que constater que ces villes à taille humaine donnent une image optimiste et positive de notre France contemporaine et c’est très important.

Selon vous, quels sont les enseignements de la crise sanitaire pour ces villes de taille moyenne ?
La crise du Covid-19, d’une intensité inédite, a révélé les limites des modes de vie dans les très grandes villes denses. La réalité des villes moyennes, territoires où il fait bon vivre, apparaît comme un format de plus en plus attirant pour les populations mobiles. Elles offrent un compromis réaliste avec des services de proximité moins nombreux mais dont la qualité est équivalente à ceux des métropoles, elles bénéficient le plus souvent de bonnes dessertes routière et autoroutière qui les connectent aux capitales économiques ou administratives, elles proposent des logements plus grands à moindre coût et des espaces naturels plus facilement accessibles.
Mais il ne faut pas perdre de vue la question de l’emploi qui reste le premier critère discriminant pour déménager. On peut donc s’interroger sur le passage à l’acte des habitants dès lors que la crise aura reflué.
Plus largement, nous sommes dans une période de forte transition : la transformation numérique, la sobriété énergétique peuvent aussi avoir un impact sur les choix de vie. Et n’ignorons pas la recherche d’une plus grande proximité sociale de la part des habitants qui considèrent que les villes moyennes sont plus apaisées, plus fluides, plus faciles à vivre en somme.

Comment renforcer la collaboration entre Villes de France et la Fabrique de la cité au service des villes moyennes ?
La Fabrique de la Cité est un think tank dédié à la prospective et aux innovations urbaines.
Elle produit dans ce cadre des publications documentées sur des thématiques liées à la transformation des villes : mobilité, aménagement urbain, énergie, révolution numérique, nouveaux usages etc. Je vous invite à cet égard, à consulter notre site et notamment notre dernière publication : Mobilités bas-carbone et inégalités : L’Etat catalyseur de transition.

 


La Fabrique organise également des rencontres pluridisciplinaires pour réfléchir aux bonnes pratiques du développement urbain et pour proposer des nouvelles manières de reconstruire les villes : ce sera à nouveau le cas cette année avec la 3eme édition des Rencontres des villes moyennes et une expédition urbaine internationale.
A l’un ou l’autre de ces titres, la Fabrique de la Cité peut bien évidemment apporter une contribution aux débats que Villes de France promeut. Je ne doute pas que nos échanges seront utiles et fructueux.

n°331

03 Fév 2022

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